mardi 24 mai 2022

Un peu d'histoire

 
En l'absence d'une introduction permettant de situer le contexte historique, lorsqu'on ouvre Salammbô, plusieurs questions se posent rapidement : où sommes-nous ? qui sont ces personnes ? quelles sont leurs motivations ? La scène se situe à "Mégara, faubourg de Carthage" (ce sont les premiers mots du roman). Un abondant festin est donné dans un palais dont le propriétaire, nommé Hamilcar, est absent. La foule qui afflue est hétéroclite, "venue de toutes les nations". On comprend qu'il s'agit de soldats, une horde de soudards dont le comportement empreint d'animosité va se dégrader sous l'effet des boissons et dont la cruauté va éclater au grand jour.

Voici le résultat en résumé de quelques recherches sur le sujet. 

Au moment où commence le récit, Carthage vient de perdre une guerre contre Rome, la première des guerres puniques. Les vaincus ont été condamnés à verser au vainqueur de fortes sommes. Les mercenaires qui avaient été recrutés par Carthage pour mener cette guerre contre Rome exigent de toucher leur solde avant de repartir dans leurs pays respectifs. Mais les caisses sont vides. D'où l'idée d'offrir aux soudards un abondant festin en les berçant de belles promesses pour repousser l'échéance. Le plan va échouer et déboucher sur la "guerre des mercenaires" dans laquelle Hamilcar Barca va jouer un rôle de premier plan. Le personnage de la fille d'Hamilcar, Salammbô, est une création flaubertienne. 

Certes, ces combats et ces intrigues de pouvoir ne manquent pas d'intérêt mais c'est le style de l'écrivain qui emporte tout.

 


 

lundi 23 mai 2022

Lu

 

J'appréhendais le moment de finir ce livre. C'est à ce genre de signe qu'on peut mesurer le plaisir pris à la lecture d'un roman. La dernière fois que j'ai vécu une expérience de lecture de cette ampleur, c'était pour Sodome et Gomorrhe. C'est rare. On est tellement loin de ces romans contemporains où l'auteur tire laborieusement le fil d'une ou deux idées avec plus ou moins d'habileté. A chaque fois que je reprenais la lecture de L'Idiot, à peine le livre entrouvert, le souffle romanesque s'abattait sur moi et m'emportait.

Extrait : Une grande réception se prépare chez les Epantchine. Aglaé, une des filles de la maison, s'adresse au Prince.

"- Saurez-vous accepter et boire convenablement une tasse de thé quand tout le monde aura exprès les yeux fixés sur vous ?

- Je crois que le saurai.

- Dommage ; sans cela j'aurais eu une occasion de rire. Cassez au moins le vase de Chine qui est au salon ! Il coûte cher ; je vous en prie, cassez-le ; c'est un cadeau, maman serait folle et fondrait en larmes devant tout le monde, tant elle y tient. Faites un geste quelconque, comme vous en faites toujours, poussez le vase et cassez-le. Asseyez-vous exprès à côté.

- Bien au contraire, je tâcherai de m'asseoir le plus loin possible, merci de lm'avoir prévenu.

- C'est donc que vous craignez d'avance de faire de grands gestes. Je parie que vous allez aborder un "sujet", quelque chose de sérieux, de savant, d'élevé ? Comme ce sera... convenable !

- Je pense que ce serait stupide... si c'était hors de propos.

- Écoutez-moi une fois pour toutes, s'écria Aglaé n'y tenant plus. Si vous vous mettez à parler de quelque chose dans le genre de la peine de mort, ou de la situation économique de la Russie, ou encore du "monde qui sera sauvé par la beauté", alors... je serai bien sûr ravie, et je rirai beaucoup, mais... je vous avertis à l'avance : ne reparaissez plus devant mes yeux ! Vous m'entendez : je parle sérieusement ! Cette fois c'est tout à fait sérieux !"

samedi 21 mai 2022

Dans la galerie virtuelle du GFIV

 

Jasper Johns, In Memory of My Feelings – Frank O’Hara, 1961
Harry Callahan, Higland Park, 1941

Willem de Kooning, Sans titre, 1960

vendredi 20 mai 2022

Retour au El Mocambo

 

Je me souviens avoir accueilli le double album Love You Live avec consternation. Cette bouillie jouée et chantée sans conviction sonnait tellement creux en comparaison avec les disques qu'on écoutait en cette année 77.  Comme nous avions pu le constater aux Abattoir l'année précédente, les titres usés joués par des stars fatiguées ne provoquaient plus de frissons. A la première écoute, on pouvait déceler quelque chose de différent sur la face où se trouvaient Cracking Up, Route 66, Manish Boy, Around an Around et Little Red Rooster, une énergie et un plaisir de jouer à peine gâché par la guitare approximative de Wood. En lisant les notes de pochette, on découvrait que ces titres avaient été enregistrés dans un petit club canadien où les Stones étaient venus jouer par surprise. Nous avons eu l'occasion, depuis, d'écouter des pirates qui promettaient le show intégral et ne tenaient pas leur promesse. C'était un peu comme de rester coincés à l'extérieur du club en tentant d'écouter ce qui se passait à l'intérieur : frustrant mais suffisant pour constater que les Stones avaient encore un peu de jus. La porte s'est enfin ouverte.


 



 


jeudi 19 mai 2022

Lecture

 

 

Je viens de terminer la lecture de L'Idiot (ça finit mal) et là, je commence celle de Salammbô. Il s'agit d'un livre ancien, une édition pour bibliophiles de 1954 "réservée aux seuls membres du CLUB DU BEAU LIVRE DE FRANCE" avec un tirage 3000 exemplaires numérotés. La maquette n'est pas renversante mais il y a des efforts.


 

Avantage avec les écrivains de chez nous : une seule version, pas de problème de traduction. J'ai vérifié à partir d'un fichier PDF, c'est le texte intégral.

Voilà. Il ne reste plus qu'à s'installer pour commencer la lecture.



mercredi 18 mai 2022

Faudrait pas débloguer


Bloguer : tenir un journal personnel en ligne (blog).

 
Blog : journal personnel, chronique d'humeur sur Internet. (le Robert)
 
Comment ne pas se poser des questions lorsqu'on tient un journal en ligne depuis une bonne vingtaine d'années ? Au début, il régnait une ambiance assez grisante. On pouvait avoir l'impression d'avoir trouvé un terrain de jeu et d'exploration échappant au quadrillage de la société spectaculaire-marchande. La zone d'autonomie pirate n'a pas duré longtemps. En un coup de baguette magique, le web est devenu une vaste zone commerciale couplée à un service de livraison à domicile. Simultanément, tout le monde est parti vivre une deuxième vie sur les réseaux sociaux. Il faut avouer que c'est pratique ; lorsque personne ne partage vos goûts et vos intérêts dans votre rue, on peut échanger (brièvement) sur Syd Barrett ou Thomas Bernhard et lâcher quelques likes et même trouver quelques motifs de rigolade. Mais de mon point de vue rien ne remplacera cette formule à laquelle je ne parviens pas à renoncer : le journal en ligne. Bien sûr, l'exercice est risqué (c'est peut-être ce qui explique que de nombreux blogs sont aujourd'hui à l'arrêt). Se concentrer sur son expérience personnelle et ses plaisirs quotidiens peu paraitre narcissique ; réagir à chaud selon son humeur à un contexte complexe et opaque vous expose à des dérapages hasardeux. Mais ces limites ont toujours été celles du journal, que celui-ci soit en ligne ou sur papier.
 
Image : Le Journal de Jane "historique" consultable ici.